C’est dans l’auberge de cette femme, que l’affaire qui fait l’objet de ce ChallengeAZ 2023 trouve son origine. Elle, c’est Léonarde FOUCAUD, épouse CUNISSE, plus connue par les habitants de Donchery et par les habitués de son établissement sous le prénom de Lucie.
C’est en effet ici que quelques mots, quelques phrases prononcés par Edouard Amédé GAIGNIERE ont tout déclenché. Il a interpellé Jean François PAILLOT et l’a, selon ce dernier, calomnié.
Son témoignage
Voici la transcription du procès-verbal de Léonarde FOUCAUD par le Tribunal de l’arrondissement de Sedan en date du 22 septembre 1880 :
« Je me nomme FOUCAUD Lucie f. CUNISSE, 44 ans, débitante à Donchery, ni parente, ni alliée de l’inculpé.
Gaignière est venu ce matin vers 8 heures prendre un verre d’eau de vie. Il a rencontré Paillot qui logeait à la maison depuis 3 jours. Gaignière est resté environ 15 minutes.
J’ai entendu qu’il disait à Paillot : « nous nous sommes trouvés ensemble à l’hôpital de Reims et depuis, nous nous sommes revus 2 ou 3 fois. » Il a cité deux ou trois noms de camarades d’hôpital et c’est tout ce que j’ai retenu de leur conversation. Gaignière n’a pas dit à Paillot qu’il avait été traité pour une maladie honteuse, et quand il est parti, ils paraissaient être en bonnes relations avec Paillot.
En sortant, Gaignière m’a dit : « Paillot n’est peut-être pas content de ce que j’ai dit l’avoir rencontré à l’hôpital à Reims » ; mais moi, je le répète, je n’ai pas remarqué qu’ils furent fâchés l’un et l’autre.
Vers 10h 1/4, Paillot qui était sorti depuis une heure, est rentré tout pâle, très ému, la sueur coulait sur son visage. Il avait les larmes aux yeux; il m’a demandé du papier à lettre et il a écrit à sa mère à Raucourt. Le voyant dans cet état, je lui ai dit : « vous avez donc tué quelqu’un pour être aussi impressionné ». Il me répondit « non, mais j’ai frappé et je vais à la mairie faire ma déclaration. »
Le même jour, les gendarmes de Sedan ont aussi recueilli la déclaration suivante :
« Le nommé PAILLOT est arrivé chez moi dimanche dernier, où il a couché trois nuits consécutives. Ce matin vers 9 heures, PAILLOT prenait son café dans ma cuisine, lorsque le nommé GAIGNIERE est entré boire la goutte, où il est resté environ un quart d’heure, celui-ci en entrant a dit à PAILLOT : tiens voilà un homme que je connais, PAILLOT lui a répondu : moi aussi votre figure ne m’est pas inconnue. Puis ils se sont reconnus pour avoir été ensemble à l’hôpital de Reims où ils étaient en maladie. GAIGNIERE est sorti par une autre porte et aussitôt son départ, PAILLOT m’a demandé ce que GAIGNIERE m’avait dit, je lui ai répondu qu’il ne m’avait pas parlé de lui. PAILLOT est monté dans sa chambre se débarbouiller, puis il m’a demandé son compte en disant que je lui porte sorti sur mon registre, qu’il allait à Mézières puis il est parti. Vers 10 heures 1/4, il est revenu, il m’a demandé une feuille de papier pour écrire à sa mère, il était très pâle, dès ému, la sueur coulait sur son visage, il avait les larmes aux yeux. Le voyant dans cet état, je lui ai dit « vous avez donc tué quelqu’un pour être aussi impressionné, il m’a répondu qu’il avait frappé et qu’il allait à la mairie faire sa déposition, puis il est parti. »
Léonarde dite Lucie, et sa famille
C’est grâce à Geneanet que j’ai retrouvé des informations concernant Lucie/Léonarde FOUCAUD et sa famille, des données que j’ai pu vérifier et sourcer.
Léonarde FOUCAUD, sans profession, et Renauld CUNISSE, alors laineur, se sont mariés le 16 juin 1862 à Donchery. Grâce à cet acte, je découvre que Léonarde est née le 19 juillet 1836 à Limoges, en Haute-Vienne. Son père dentiste demeurait à Reims où il est décédé, et sa mère, dentiste ambulante, est domiciliée en Haute-Marne.
Du côté de l’époux, j’apprends que son père était tonnelier et sa mère débitante. Ils sont tous deux décédés.
Son acte de naissance est intéressant et original, il cumule les particularités.
- Ses parents n’étaient pas mariés, et sont mentionnés sans domicile fixe.
- Son père était « mécanicien artificier »… rappelons-nous qu’il devient moins de 26 ans plus tard… dentiste !
- Ses parents sont tous deux porteurs d’un passeport délivré à Charleville un an plus tôt.
- Léonarde est née dans la voiture, à Limoges, place royale, division du Nord.
Léonarde FOUCAUD et Renauld CUNISSE ont eu au moins 6 enfants, tous nés à Donchery. Bien peu ont survécu à leurs toutes premières années d’existence.
- Marie Amelia, enfant naturel né sous le nom de FOUCAUD, est née en 1859 et décédée en 1860
- Enfant sans vie en 1865
- Henri né en 1869 et décédé en 1870
- Henri Renaud né en 1867 et décédé lui aussi un an plus tard en 1868
- Jean Baptiste Henri né en 1872 et décédé à 27 ans. Il s’était marié à Sedan.
- Catherine Adèle est la seule qui a « survécu » : née en 1863 et mariée à Léon Achille AUMAITRE en 1887, elle s’est éteinte à près de 90 ans, en 1952.
Mais où est-elle passée ?
Pour trouver trace du décès de Léonarde CUNISSE, à nouveau merci à Geneanet ! Et rendez-vous à Montmorency, dans le Val d’Oise, ville dont était originaire le mari de sa fille Catherine Adèle. J’ai recherché dans les recensements de Montmorency pour avoir une idée plus précise de son départ des Ardennes.
- 1901 : 149e page sur 179 que compte le registre pour trouver le foyer de Catherine Adèle et son mari Achille, leurs 2 enfants de 6 et 12 ans. Le foyer suivant correspond au père d’Achille mais aucune mention de Léonarde.
- 1906 : je retrouve Léonarde qui fait alors partie du foyer de sa fille
Léonarde FOUCAUD est finalement décédée le 8 mars 1918, à 81 ans, à Montmorency.
Sources : AD Ardennes, AD Val d’Oise, AD Haute-Vienne, Geneanet
Illustrations : AD Ardennes, AD Val d’Oise, AD Haute-Vienne, collection personnelle
Destins d'Aïeux 
Voilà qui ne me paraît pas justifier un meurtre… Quelle histoire !
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Un verre d’eau de vie à 8h !!! Non mais ils sont sérieux?? Forcément après ça part en cacahuète…
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L’eau de vie à 8h… aïe!
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